
Big data : de quoi parle-t-on ?!
Il faut prendre en considération qu’un site internet est rarement une pièce unique sur un serveur unique. Pour afficher une page, le site va le plus souvent vous demander d’aller charger des éléments sur d’autres serveurs : une police de caractère sur un serveur Google, des images stockées sur un serveur Amazon, une appli pour « liker » votre page Facebook en lien avec Facebook, etc.
Ainsi, quand vous naviguez sur internet, vous envoyez des informations aux Géants du Net lors de la quasi totalité de votre navigation, même si vous n’utilisez pas le moteur de recherche de Google, ni aucun de ses services. Amazon n’est pas seulement un vendeur de produits sur internet, il est également devenu un géant du stockage de données (33 % des données numériques internet mondiales sont stockées chez Amazon Web Services – source).
L’intérêt de ce type d’information, multiplié par les milliards d’humains qui utilisent internet – autrement dit : intérêt de ce big data – c’est de créer des profils type d’utilisateurs. En collectant et en analysant l’ensemble des données que nous leur transmettons en naviguant sur internet, ils peuvent savoir quel est notre âge, notre catégorie sociale, ce que nous aimons, ce qui nous intéresse, nos hobbys, nos opinons politiques, mais également les lieux depuis lesquels nous nous connectons – donc où nous habitons, où nous travaillons, l’évolution de toutes ces informations au fil des ans, etc.
Ajoutons à cela les informations transmises notre téléphone portable ainsi que tous nos objets connectés. Pour peu que nous ayons un smartphone Android, qui nécessite généralement l’utilisation d’un compte Google et que nous n’avez pas supprimé volontairement l’utilisation de notre position GPS par Google (et/ou une application du groupe Meta – Facebook, Instagram – ou tout autre application mobile), ces derniers savent également les lieux que nous fréquentez, qui sont les personnes qui fréquentent les mêmes lieux, qui nous avons rencontré, quand, où et pendant combien de temps, à quelle heure nous nous couchons et nous nous réveillons, quel est l’usage de notre téléphone portable, potentiellement qui nous appelons, à quelle fréquence et pendant combien de temps, etc ; une montre connectée mesure en temps réel notre état de santé, etc.
Enfin, ces données ne sont pas accessibles uniquement par les Géants d’internet dont nous acceptons l’utilisation et les politiques de confidentialité. L’affaire Wikileaks sortie en 2011 a révélé que la NSA et le FBI pouvaient se connecter directement sur les serveurs des 9 entreprises leaders du numérique dont Microsoft, Yahoo, Google, Facebook et Apple. Ils peuvent extraire les fichiers audio, vidéo, photo, mails, documents et codes d’accès qui leur permet de suivre tous les individus et leurs contacts en temps réel (plus d’infos).
Au final, grâce à la quantité de données que nous laissons derrière nous et qu’il utilisent, tous ces organismes nous connaissent sans doute mieux que n’importe lequel de nos amis, et peut-être même que nous-même car ils gardent en mémoire chacune de ces données pour longtemps. Avant de répondre à la question suivante, prenez le temps de fermer les yeux et concentrez-vous : accepteriez-vous que vos proches aient entre ses mains toutes ces informations et connaissent le détail de votre vie ?
Nous avons besoin de notre vie privée pour nous sentir en sécurité. Nous avons besoin de savoir qu’à certains moment s de notre vie, nous sommes seuls et nous pouvons faire ce que nous souhaitons sans être surveillés par quelqu’un d’autre. Pourtant lorsque l’on parle de la thématique du big data et de l’importance qu’elle prend au niveau planétaire, une réponse courante que j’entends est :
« Je n’ai rien à cacher.
Google et le gouvernement peuvent bien tout savoir de ma vie, quelle importance ?! »
N’avons-nous vraiment rien à cacher ?
Ce big data, couplé à ce qu’ils appellent intelligence artificielle, c’est à dire des algorithmes mathématiques prenant en compte de nombreux facteurs, permettent d’analyser les comportements humains et d’apprendre énormément sur les groupes de personnes, leurs idées, leurs actions. Comme toute technologie, on y retrouve des aspects positifs et des aspects négatifs. Utilisée à des fins dictatoriales, on retrouve la mise en place d’un système de « crédit social » en Chine qui pousse à la surveillance permanente des citoyens qui gagnent ou perdent des points en fonction des comportement jugés positifs ou négatifs par le pouvoir en place. Des comportements qui ne rentrent pas dans les normes édictées par le Parti induisent de mauvaises notes qui empêchent, par exemple, de voyager ou d’obtenir un emprunt bancaire. Par exemple, il est possible de perdre 5 points de crédit social si on brûle nos ordures ménagères, ou de gagner 5 points de crédit social si on dénonce une personne ayant participé à une manifestation illégale.
Au sein des sociétés occidentales, le scandale de Cambridge Analytica a démontré que les données de 87 millions d’utilisateurs de Facebook ont été utilisées pour influencer l’opinion dans un but favorable au Brexit et à l’élection de Donald Trump à la présidence des États-Unis. Leur outil : afficher sur leur mur Facebook les informations qui pourraient les faire changer d’avis (plus d’infos).
Les données que nous partageons n’impactent pas que nous, elles impactent également nos proches ainsi que l’ensemble de la société. Toutes les informations que l’on donne sur nos actions et notre personnalité sont des informations utiles pour ceux qui souhaitent nous manipuler ou nous contrôler. Pouvons-nous faire aveuglement confiance à Google, Facebook, Amazon, les États et tous les autres acteurs, pour utiliser nos données uniquement à des fins éthiques dès aujourd’hui, mais aussi dans les dizaines d’années qui arrivent ?
Il me semble important d’être informé de ces enjeux pour prendre conscience de l’implication des choix que nous faisons au quotidien lorsque nous utilisons des outils numériques.

Anecdote
Message de Mark Zuckeberg à un ami, peu après avoir créé Facebook sur le campus d’Havard aux États-Unis :
Zuck: Yeah, si tu as besoin d’infos sur n’importe à Harvard, tu me demandes.
Zuck: J’ai plus de 4000 mails, photos, adresses, etc.
[L’ami]: Quoi ? Comment t’a eu ça ?
Zuck: Les gens me les ont juste envoyé. Je ne sais pas pourquoi.
Zuck: Ils me « font confiance »
Zuck: Put** d’idiots.
Source : The New Yorker, The Face of Facebook, le 20 septembre 2010 (article disponible en ligne)
Chiffres clés
Big Data :
50 000 Go / seconde de données enregistrées
4,9 milliards d’utilisateurs d’internet dans le monde (Statista, 2021)
Facebook : créé en 2004 | 2 milliards d’utilisateurs | 27,6 milliards de CA
Meta, la société mère de Facebook possède notamment Instagram et Whatsapp
Google : créé en 1998, Alphabet la société mère de Google possède notamment YouTube, Waze et a développé le système d’exploitation Android ainsi que le navigateur Chrome
Amazon possède notamment Alexa, Twitch.
Parmi les clients d’Amazon web services : Engie, Airbus, Netflix, Goldman Sachs, Société Générale, Radio France, Veolia, Renault, SNCF, TF1, Bouygues Telecom, Canal +, Decathlon, Le bon coin, Axa Microsoft : Windows, Skype, Xbox, Bing, LinkedIn,
Les conditions d’utilisation d’Instagram
Jenny Afia, juriste experte en protection des données personnelles a réécrit les conditions d’utilisation du réseau Instagram dans un langage accessible pour les enfants, et plus compréhensible pour leurs parents.
– Officiellement, vous possédez chacune des photos et des vidéos originales que vous postez, mais nous sommes autorisés à les utiliser et nous pouvons laisser d’autres les utiliser également, partout dans le monde. D’autres peuvent nous payer pour la réutilisation de vos images, mais nous ne vous paierons pas pour ça.
– […] Nous pouvons garder, utiliser et partager vos informations personnelles avec des entreprises connectées à Instagram. Ces informations incluent : votre nom, adresse mail, école, adresse, photo, numéro de téléphone, vos likes et dislikes, où vous allez, où sont vos amis, le nombre de fois où vous venez sur Instagram et toutes les autres données personnelles que nous avons telle que votre date de naissance ou les personnes avec lesquelles vous chattez, y compris vos messages privés (Dms).
– Nous pouvons vous envoyer des publicités liées aux centres d’intérêt que nous avons détectés. Vous ne pouvons pas nous empêcher de faire ça et ce que ne sera pas toujours évident qu’il s’agit d’une publicité.
– Nous pouvons modifier ou supprimer Instagram, ou vous empêcher d’accéder à nos services à tout moment, pour n’importe quelle raison et sans vous avertir en amont. Nous pouvons également supprimer des posts ou d’autres contenus de manière aléatoire, sans vous avertir, quelle qu’en soit la raison. Si nous le faisons, nous n’aurons pas à vous indemniser et vous n’aurez aucun droit de vous plaindre.
– Nous pouvons vous imposer de changer de nom d’utilisateur qu’elle qu’en soit la raison.
– Nous pouvons, mais nous ne sommes pas obligés, de supprimer, éditer, bloquer et/ou surveiller tout ce qui est posté et tous les comptes qui enfreindraient l’une de ces règles. Nous ne sommes pas responsables si quelqu’un enfreint la loi ou enfreint ces règles; mais si vous les enfreignez, vous en êtes responsable.
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