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Décrocher !

On associe souvent le terme « sobriété numérique » à la manière d’utiliser moins d’énergie et, pour caricaturer, à supprimer les mails non nécessaires de notre boîte mail.

Si je vais – un peu – parler de la consommation d’énergie du numérique, ce qui me tient beaucoup plus à cœur, c’est notre surutilisation des écrans. Non, notre méga-utilisation non-stop de nos écrans. J’exagère ? Ce n’est pas votre cas ? Vous avez de la chance (et vous n’êtes pas nombreux et nombreuses). Ça a été mon cas, et c’est celui de beaucoup de mes amis et amies. Je suis parfois impressionnée d’entendre l’un ou l’autre me dire qu’il ou qu’elle s’est couchée à 3h ou 4h du matin parce qu’il ou elle n’arrivait pas à décrocher d’Instagram.

Une drogue ?

Certains usages des écrans sont des drogues. Le mot est trop fort ? Je peux vous assurer que quand je commençais a regarder une série et que j’enchaînais tous les épisodes jusqu’à la fin, ç’en était une. Si par malheur, je devais quitter mon écran pour aller travailler ou faire autre chose auquel je ne pouvais pas déroger, je ne faisais qu’y penser jusqu’à ce que j’ai mon nouveau shoot. Seul la fin de la série, avec un goût un peu amer parce qu’il n’y a plus de nouveaux épisodes, pouvait m’arrêter dans ma boulimie. J’en ai discuté avec beaucoup de mes amis, et je pense que je suis un cas assez excessif, même si, dans l’idée générale, je sais que cela arrive à nombre d’entre nous.

La seule solution que j’ai trouvé est une cure… totale. Je refuse catégoriquement de regarder même « juste un » épisode d’une série. C’est un peu violent, d’autant que l’on me promet souvent que « cette série est vraiment super intéressante, je SAIS que tu vas l’aimer » ou « qu’il n’y a que 10 épisodes ». Sauf que je sais que 10 épisodes, c’est ne rien faire pendant les deux prochains jours. Et bien… non.

Les jeux, réseaux sociaux et de nombreuses autres applications ont été créées pour capter notre attention. C’est tellement pratique ou relaxant de faire quelque parties de ______ [ajoutez le nom de votre jeu préféré] dans les transport en sortant du travail ou de regarder les vidéos de ________ [ajoutez le nom de votre YouTubeur préféré].

Non, ce n’est pas grave de profiter de ces moments de relâchement. Cela devient problématique quand on ne sait plus s’asseoir quelque part et attendre cinq minutes sans sortir notre smartphone pour commencer________ [au choix : une partie de jeux, la lecture d’un article, la suite d’une vidéo, les nouvelles sur les réseaux sociaux ou tout simplement les derniers mails reçus].

Le problème, c’est que notre cerveau a besoin de moments de pause. Ils nous permettent de prendre du recul sur notre vie, de trouver des idées nouvelles, de résoudre les problématiques auxquelles nous faisons face, de laisser notre imagination travailler et nous ouvrir sur de nouveaux univers. Ce processus est nécessaire, ne serait-ce que pour limiter le stress. Pourtant, ces moments de pause commencent souvent par un moment d’ennui. C’est à partir de cet ennui momentané que l’on trouve le chemin vers le repos et l’éveil de l’imagination.

Laisser notre esprit divaguer… Dans nos vies surchargées, nous ne pouvons le faire que pendant les moments off : l’attente dans le cabinet du médecin, entre deux rendez-vous professionnels, dans les transports en commun, quand on attend les enfants devant l’école ou tout autre moment de transition d’une activité à l’autre.

Mais depuis que le téléphone, cette porte vers le monde entier, est à portée de main 24h/24h, nous avons acquis un nouveau réflexe : le regarder dès qu’on a une minute de pause. Une étude de 2014 indiquait que les utilisateurs de smartphone regardent leur téléphone 221 fois par jour, ce qui signifie, si on exclut les heures de sommeil, toutes les 5 minutes. Car en dehors de moments de pause, notre téléphone est utile à tout.

Pour conclure, ce qui est en cause avec notre téléphone portable, ce n’est pas son utilité. Le téléphone sert à tout et c’est hyper pratique. Mais si, comme la plupart des outils que nous utilisons sont développés pour créer une addiction, nous perdons notre autonomie individuelle. Nos comportements, nos ressentis, nos émotions sont modifiées pour que nous utilisions ces outils et le plus grave, c’est que cela se fait la plupart du temps au détriment d’autres activités que nous jugeons plus estimables.

« Tant que l’on reste dans un business model qui gagne de l’argent avec notre temps d’attention et tant que les utilisateurs ne comprennent pas que ce business model est toxique, il n’y a pas d’échappatoire. » Guillaume Chaslot, président d’Algotransparency